C’est l’image que le blog argentin « The Wanderer » (repris ici en italien par AM Valli) donne de l’Eglise ballotée par les vents hostiles venus d’Allemagne qui la menacent de schisme, et dont Jorge Bergoglio tient (si mal) la barre.

La tempête

(Texte original en espagnol:  caminante-wanderer.blogspot.com )

En octobre 2014, j’ai publié (voir annexe, ndt) un article commentant un petit pamphlet de Ronald Knox, écrit en 1914, dans lequel il montrait de manière satirique les conséquences possibles des ouvertures, révélées lors d’une réunion œcuménique tenue dans la ville africaine de Kikuyo, dont faisaient preuve à l’époque certains secteurs minoritaires de l’Église anglicane. Quelques décennies plus tard, l’Église anglicane est allée bien au-delà de la satire imaginée par Knox.

Je vérifie constamment à quel point l’Église catholique, moins d’un siècle plus tard, suit les traces des anglicans, et je crains fort que si nous continuons sur la même voie, nous ne finissions comme eux. Dans les années 1980, même le commentateur religieux le plus virulent n’aurait pu imaginer que quarante ans plus tard, il y aurait un débat sérieux sur la possibilité et l’opportunité de bénir, voire de marier, les couples de même sexe.

Les anglicans avaient cependant un avantage sur nous. À côté du navire en train de couler, il y avait un canot de sauvetage qui permettait à ceux qui le voulaient d’être sauvés du naufrage. Quand, en 1993, l’Église d’Angleterre a décidé d’ordonner des femmes prêtres, Graham Leonard, évêque de Londres, a décidé de quitter cette communion et de se convertir à l’Église de Rome, où il a été ordonné prêtre peu après. Et lorsqu’en 2010, les anglicans ont franchi une nouvelle étape en décidant d’ordonner également des femmes évêques, cinq évêques anglicans sont retournés dans l’Église catholique, et ce mouvement ne s’est pas arrêté. Il y a un peu plus d’un an, un autre évêque du sud de l’Angleterre, ancien aumônier de la reine, s’est converti. Et la même chose s’est produite avec de nombreux prêtres et fidèles. Ils sont montés dans le canot de sauvetage et se sont éloignés de l’épave.

Le problème est que nous, catholiques, n’avons pas de canot de sauvetage et que nous sommes dans le navire qui coule rapidement sous le commandement du pape François. Il y a quelques jours, nous avons évoqué le schisme allemand qui risque de se produire après la fin du fameux « chemin synodal », et nous avons dit que rien ne se passera. Les Allemands ne feront pas de déclaration officielle de séparation du quartier général de Pierre et appliqueront les résolutions qu’ils prendront avec plus ou moins de hâte. Et il ne serait pas étrange que dans quelques années, ou même plus tôt, un évêque ordonne des diaconesses, et peu après des prêtresses. Il ne sera pas non plus étrange qu’un prêtre catholique marie des personnes divorcées et des homosexuels, et qui sait quelles autres absurdités. Et Rome ne fera rien, ni avec François ni avec celui qui lui succédera. Elle ne le fera pas, non par manque de conviction, mais par manque de force. Rome sait parfaitement que toutes les sanctions ou interdictions qu’elle établit seront ignorées. Ou bien les ouvertures allemandes passeront par les discernements sur lesquels Bergoglio a tant insisté, et les évêques allemands finiront par dire que ces ordonnances ne s’appliquent pas sur leur territoire. Les seuls qui obéissent à Rome sont les évêques et les catholiques conservateurs.

Le dernier article de ce blog, sur la généralisation de la communion sur la main, en est un bon exemple. Au-delà des souhaits de Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI, amplement documentés par des décrets et des mesures visant à la limiter ou à la supprimer, la pratique de la communion sur la main s’est imposée, les directives papales ont été ignorées par les évêques du monde entier, et Rome n’a rien fait, non pas tant parce qu’elle ne voulait pas, mais parce qu’elle ne pouvait pas. Et aujourd’hui, nous en sommes au point où il est obligatoire de recevoir la communion sur la main.

La barque de l’Église coule et le pire de la tempête approche. Ses officiers ont choisi les capitaines les plus négligents et les plus imprévoyants qu’ils on pu trouver, des gens qui, au lieu d’ordonner d’affaler les voiles pour éviter la tempête, y sont entrés toutes voiles dehors. Et nous à bord : effrayés, fatigués et tristes. Nous savons, bien sûr, que Quelqu’un dort et se réveillera au bon moment, mais en attendant, nous devons supporter d’être ballottés par les vagues et les vents.

Annexe

DE KIKUYO À ROME AVEC RONALD KNOX

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Un commentaire arrivé sur le blog il y a quelques jours m’a rappelé un texte de Ronald Knox, pas très connu, qui a été écrit pendant les dernières années de sa période anglicane, alors que l’Église d’Angleterre traversait une situation similaire à celle que nous vivons aujourd’hui dans l’Église catholique.


Tout a commencé lorsque deux diocèses anglicans d’Afrique ont participé à un congrès des églises protestantes à Kikuyo sur le thème de la collaboration entre les différentes dénominations chrétiennes. La réunion s’est terminée par une célébration liturgique œcuménique, célébrée par un évêque anglican et « concélébrée » par des pasteurs protestants.


Cette attitude d’ouverture de certains secteurs de l’Église établie était-elle juste? Bien entendu, Knox n’était pas du tout d’accord et, pour faire valoir son point de vue, il a écrit en quatre jours un petit livre ou pamphlet dont l’argument était une simple reductio ad absurdum. Il l’a appelé Reunion All Round et vous pouvez le lire en anglais ici.

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Transposons les arguments de Ronnie à notre situation actuelle : si c’est un devoir, comme il semble, que tous les chrétiens doivent s’unir, en effaçant les différences qui les séparent – je suggère de relire cette catéchèse [lien « mort », ndt] du Pape François – pourquoi ne pas s’ouvrir aussi aux non-chrétiens ? Pourquoi ne pas s’unir aux juifs ? La seule chose qui nous sépare d’eux est le Concile de Jérusalem. Et avec les musulmans ? Il serait toujours possible de combler l’écart entre notre monogamie et leur tétragamie en partageant les différences : deux épouses pour chacun. Même les athées devraient faire partie de cette union pan-chrétienne, car il serait toujours possible – et ce serait une tâche à confier à Mgr Trucho Fernandez – d’arriver à une formule de consensus sur la nature divine qui comprend simultanément l’existence et la non-existence.

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Si les principes qui, à l’époque de Knox, étaient proposés à Kikuyo et que le pape François propose aujourd’hui, sont appropriés, nous devons les suivre jusqu’à leurs ultimes conséquences. Si, au nom de la charité, l’Église a le devoir d’inclure en son sein tous ceux qui font profession d’être chrétiens, et qu’elle doit elle-même être prête à faire tous les sacrifices que cela implique – qu’ils soient liturgiques, disciplinaires ou doctrinaux – pourquoi ne pas inclure également toutes les personnes de bonne volonté ? Pourquoi une croyance, par exemple la divinité de Jésus-Christ, serait-elle un obstacle à l’inclusion dans l’Église des portes ouvertes qu’ils nous annoncent depuis Rome ? Pourquoi devrions-nous inclure, par exemple, un homme bon comme Roberto de Mattei et exclure un autre homme bon [??] comme l’athée Scalfari ? Si l’Église, qui ne peut jamais renoncer à la charité, empêche de nombreux hommes d’être inclus dans son corps simplement pour des raisons disciplinaires ou doctrinales, n’est-il pas temps de chercher une Église plus charitable et d’abattre ces murs obscurantistes ?

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Ronald Knox a poussé jusqu’au bout, dans un exercice de logique, les principes qui commençaient à apparaître au début du vingtième siècle dans l’Église d’Angleterre, mais il n’a jamais pensé que, près de cent ans plus tard, cette Église approuverait l’ordination des femmes évêques. C’était une absurdité trop grotesque.

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Je me demande si Bergoglio n’est pas aussi une absurdité trop grotesque pour avoir été imaginée par des catholiques il y a cinquante ans.

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https://caminante-wanderer.blogspot.com/2014/10/de-kikuyo-roma-con-ronald-knox_17.html
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