De celle célébrée au Vatican le 31 janvier par Mgr Sorondo, chancelier de l’Académie pontificale des sciences et de l’Académie pontificale des sciences sociales, en présence du président argentin nouvellement élu et de sa compagne (en costume de première communiante!), on n’a en général retenu que l’image (filmée de dos) de deux tourtereaux recevant la communion alors qu’ils sont divorcés et vivent en concubinage notoire. Mais il y avait bien autre chose, dans cet authentique meeting politique, qui a célébré surtout l’héritage politique du dictateur argentin Juan Peron et la proximité idéologique avec François.
Et Vive Peron et le Pape.
Au Vatican, la messe se transforme en meeting politique
Andrea Zambrano
6 février 2020
La NBQ
Ma traduction
Pas seulement une communion sacrilège. La messe pour le président argentin Fernandez dans les grottes du Vatican était un concentré de slogans idéologiques qui soulignaient une dérive inquiétante: la messe a perdu Dieu pour se faire revendication politique. Dans l’homélie de l’évêque Sorondo, Perón a été « sanctifié » et rapproché du pape Bergoglio alors qu’une photo d’un prêtre montonero apparaissait sur l’autel. Mais il y a un évêque qui se rebelle contre ce sacrilège sous les yeux de Saint Pierre.
Pas seulement la communion sacrilège du président de la nation avorteuse. Le péronisme argentin débarque à Rome et occupe même la liturgie dans une messe idéologique et politique qualifiée de « misa peronista » par les journaux argentins. C’est la nouvelle frontière de la praxis du moment: étant donné que le transcendant s’éloigne de plus en plus, c’est la politique qui occupe son espace. Sous les yeux de Saint Pierre, dont les pauvres membres martyrisés par les Romains reposent à quelques pas de l’autel. Ce qu’il doit endurer: une messe politique célébrée par le chancelier de confiance du Pape François, l’évêque Sanchez Sorondo, argentin, qui semble avoir pris à cœur, après le blasphème de la Chine comme pays où la doctrine sociale de l’Église est appliquée, de réformer la messe dans une optique péroniste et privatisée. Souvenirs personnels et éloges du caudillo qui a été excommunié par l’Église pour ses fréquentations maçonniques et sa lutte contre l’Église, avec la création d’une sorte d’Église nationale, sauf réhabilitation ultérieure.
La célébration date du 31 janvier. Quelques minutes après la rencontre entre le président Alberto Fernandez et sa compagne (non épousée) avec le pape François. Tous deux sont filmés en train de communier. Mais il est un avorteur déclaré et vit more uxorio. Et ce, malgré le fait que la lecture du jour – pour l’ironie, à coup sûr, Dieu est imbattable – rapporte l’épisode de l’adultère de David avec Bethsabée à la fin duquel il est dit « Parole de Dieu » et où le Psaume affirme que « je reconnais ma faute, j’ai toujours mon péché présent à l’esprit ».
Mais avant que la communion sacrilège de Fernandez ne soit consommée, la messe avait déjà pris le pli d’une partie de campagne péroniste.
A commencer par l’image placée sur l’autel, celle de Carlos Mugica, prêtre marxiste, tiersmondiste, proche de la Théologie de la libération, considéré – même s’il n’a jamais embrassé la lutte armée – comme l’assistant spirituel des Montoneros. Il a été assassiné en 1974, mais il ne semble pas qu’il ait été béatifié au point d’être placé sur l’autel comme exemple pour les catholiques.
L’homélie de Sorondo, ensuite, illustre vraiment à quel point on peut s’approprier la liturgie pour ses propres fins politiques.
Habitué à faire l’éloge du régime chinois, il n’ eu aucun problème pour faire aussi l’éloge de Perón, et entre souvenirs personnels et plaisanteries, il a même trouvé le temps de révéler une proximité entre le pape François et le caudillo: « Ce que Perón n’aurait jamais imaginé, c’est que l’Argentine puisse avoir un pape. Et un pape proche de lui », a-t-il dit entre une collecte et une préface.
Bref, Sorondo a non seulement révélé les sympathies péronistes de Bergoglio – ce qui n’est ni mystérieux ni honteux, après tout – mais il a également présenté sous forme homilétique un trait d’union entre le chemin de l’Église et celui de la Nation: « Il a beaucoup fait, nous devons continuer sur ce chemin ».
Ce n’est pas un hasard si la messe a été appelée « de réconciliation », même si l’on ne sait pas de quoi, étant donné la situation irrégulière du président. Peut-être une réconciliation entre la Casa Rosada et Sainte Marthe étant donné les relations glaciales qui ont toujours existé avec le prédécesseur de Fernandez, Mauricio Macri.
Il est certain que Sorondo est un supporter du péronisme, mais il utilise la messe pour nous faire savoir que « Dieu nous montre un chemin important, qui veut redresser l’Argentine et la mettre debout une fois pour toutes », a-t-il déclaré. En bref: Fernandez est un homme de la Providence et le gouvernement péroniste une bénédiction du ciel. Parole de Sorondo, mais pas de Dieu.
La chose n’a pas échappé à Mgr Hector Aguer, évêque émérite de La Plata, l’un des rares évêques qui, ces derniers temps, a eu le courage de parler apertis verbis contre certaines dérives ecclésiales: « Je ne crois pas que la messe ait contribué à la réconciliation effective des Argentins, étant donné que beaucoup d’entre eux ne veulent pas voir l’Église prendre parti dans un secteur politique, quel qu’il soit et au cas où ils auraient également une opinion négative du célèbre ancien président et de son action gouvernementale (Perón, ndlr) ». Une défense dans les règles de la doctrine liturgique et – tant que nous y sommes – également de la doctrine sociale de l’Église.
Aguer a également souligné la communion sacrilège du président Fernandez et a rappelé que « sa pratique religieuse assidue est inconnue et on sait que les deux ne sont pas unis dans le sacrement de mariage ».
Aguer mis à part, l’épisode a cependant été éclipsé comme l’eau sur le marbre de l’autel du Vatican.
L’épisode ne doit cependant pas être déclassé à la rubrique des problèmes concernant exclusivement l’Église ou la politique argentine. La personnalisation de la messe dans une perspective péroniste répond à la nécessité précise de mondialiser le saint sacrifice à des fins politiques et idéologiques. Aujourd’hui, c’est Perón. Demain, une autre exigence politique pourrait se faire sentir. Que ferons-nous? Préparerons-nous aussi les missels pour le nouveau rite socialiste? Nous agenouillerons-nous à l’élévation lors du canon du souverainiste?