Aldo Maria Valli a réussi à faire de son blog Duc in Altum une sorte de think tank, un salon de discussion, ou mieux, un chaudron d’idées dans lequel sont débattus en toute sérénité, d’un point de vue original parce qu’aujourd’hui totalement marginalisé, les grands problèmes qui agitent notre société et plus particulièrement l’Eglise. A l’occasion d’une manifestation promue par l’association Liberi in Veritate qui s’est tenue le week-end dernier, il a prononcé un long et passionnant (c’est mon avis!) exposé dans lequel il offre un tableau synthétique de la situation créée autour de l’église bergoglienne et sa proposition synodale, mais aussi du post-covid et de ses multiples ramifications, des récentes élections générales italiennes (dont la signification dépasse largement les frontières de la botte), etc.. Et il suggère des pistes pour que le chrétiens l’affronte en gardant la boussole. Cela alors que résonnent des appels intéressés et éminemment suspects de ceux qui invitent à « tourner la page » sur l’épisode pandémique. « Non à la réconciliation des contraire. Non à l’hypnose collective », dit-il.

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Une pacification obtenue au prix de la dissimulation du cui prodest, une pacification obtenue en faisant table rase des affaires et des relations sales entre les élites transnationales, le monde de la pseudo-science, les appareils technologiques et industriels, les médias et la politique, n’en serait pas une

Contre l’hypnose collective. Résistance, désobéissance civile, mémoire. Non à la réconciliation des contraires

Il est de plus en plus évident que le mondialisme crée le besoin de son propre produit à travers les urgences. Nous assistons à une institutionnalisation des urgences. Si ce n’est pas l’urgence sanitaire, c’est la climatique, si ce n’est pas la climatique, c’est l’énergétique, peut-être induite par une guerre à son tour provoquée aussi dans le but d’alimenter une atmosphère d’instabilité, d’insécurité et d’alarme constante. Le résultat est toujours le même : nous nous habituons à voir l’homme comme un problème et les relations humaines comme quelque chose à réduire ou à éliminer. Alors que d’un côté, on prône l’intégration homme-machine, de l’autre, on impose la distanciation dans tous les domaines et on aboutit à un réel isolement même si nous sommes connectés par de multiples supports technologiques. L’objectif est de produire l’homme-masse : craintif, effrayé, isolé, intimidé, malléable, manipulable. Et aussi appauvri, tant intérieurement que matériellement.

La proposition synodale de l’église bergoglienne, réduite au niveau des publireportages, cherche à son tour à se placer dans ce sillage. L’église bergoglienne considère la religion comme un produit à adapter aux besoins de sa clientèle et, sur la base de cette vision toute horizontale, tente d’offrir quelque chose qui soit conforme au mondialisme. Elle avance avec un mélange d’ignorance, de superficialité, d’obtusité. Mue non pas par la foi mais par une idéologie, elle ne tolère pas que ceux qui conservent une vision transcendante de la vie se tournent vers autre chose : elle ne peut accepter que ceux qui ont encore, malgré tout, une vision verticale de l’existence exigent des propositions radicales, authentiquement tournées vers le Ciel pour le salut de l’âme, et ne se contentent pas d’une singerie d’esprit mondain.

Le mondialisme et l’église bergoglienne partagent ce que nous pourrions appeler une vision commerciale. Tous deux cherchent à commercialiser un produit, tous deux pensent en termes de profit. Mais alors que le mondialisme a une stratégie claire et sait où il veut aller, l’église bergoglienne n’est qu’une imitatrice pathétique, courant vers l’auto-dissolution en embrassant les dogmes de la modernité.

Les deux entités, le mondialisme et l’église déviante, sont unies par la subversion du mal et du bien. Ils peignent comme bon ce qui est mauvais pour l’homme et comme mauvais ce qui est bon. Il suffit de penser aux mises en garde répétées de l’église bergoglienne contre les « rigides », alors que c’est précisément la fluidité morale qui est à l’origine de tant de désordre et, en définitive, de tant de malheur.

Beaucoup, cependant, commencent à ouvrir les yeux. Et que voient-ils ? Même si c’est parfois avec difficulté et parfois avec douleur, ils sentent que le problème auquel nous sommes confrontés ne se réfère plus à une sphère donnée (qu’elle soit sociale, culturelle, politique, religieuse), mais qu’il est anthropologique : il y a des gens qui veulent refaire l’homme. C’est le retour de l’éternelle prétention gnostique de créer l’homme nouveau. La nouveauté est double : d’un côté, nous avons une église (je me réfère évidemment à elle comme limitée à sa composante humaine) qui, jusqu’à ses dirigeants, se met au service des sorciers et se plie à leurs visions, une église qui n’est plus un rempart pour la défense de la vérité, mais une servante. De l’autre, nous avons une accélération sans précédent : la machine mondialiste agit à grande vitesse.

Que signifie aujourd’hui ouvrir les yeux ? Je pense que cela signifie devenir automatiquement traditionnels. J’utilise ce terme,  » traditionnels « , pour de bonnes raisons, pour l’opposer aux  » traditionalistes  » qui veulent nous ghettoïser. Dans la tradition se trouve aussi la réponse à nos problèmes actuels. Et c’est, en définitive, une réponse simple. Il n’est pas nécessaire d’inventer de nouvelles formules. Être conscient de la bataille en cours, c’est déjà être traditionnel, et cela signifie être toujours traditionnel, dans tous les domaines : pas seulement dans le domaine liturgique, pas seulement dans le domaine théologique. C’est une façon d’être, une habitude mentale, culturelle, spirituelle. Et permettez-moi de citer la célèbre expression de Giuseppe Prezzolini, qui m’est si chère. Il faut devenir membre de la « Congrégation des Apoti« , c’est-à-dire de ceux à qui oàn ne la fait pas. De ceux qui ne se laissent pas hypnotiser. De ceux qui, les yeux ouverts et l’esprit clair, disent « Je ne marche pas » et agissent en conséquence.

Comment ? Tout d’abord avec un mode de pensée qui est à l’opposé de la pensée toute idéologique du mondialisme et de l’église bergoglienne. Nous devons retrouver le sain réalisme chrétien, ce sain caractère concret de celui qui sait que Dieu existe et qui croit. Il croit en la Trinité et en l’Incarnation, et ne sépare donc pas la vie privée de la vie publique, la religion de l’État, la Foi de la Morale. Nous devons vivre la dimension trinitaire non seulement en tant qu’individus, en tant que personnes, mais aussi en tant que corps social qui croit au Seigneur et l’aime et qui en fait la base de tout choix, de tout comportement.

Nous voyons déjà cette fraternité à l’œuvre aujourd’hui. De nombreuses personnes qui ne se connaissaient pas jusqu’à récemment sont entrées en contact, ont appris à se connaître et à se reconnaître. Il s’agit d’une véritable fraternité, pas à la manière de « Fratelli tutti ». Ou plutôt : nous sommes effectivement tous frères, mais pas parce que nous sommes unis par une fraternité de type maçonnique, pas parce que nous sommes unis par une idée confuse, déformée et instrumentalisée du bien commun, mais parce que nous sommes les enfants d’un seul Père dans le Christ, fidèles à ses commandements. Un Père qui a le droit de recevoir un culte digne de ce nom, non seulement au moment de la liturgie, mais avec toute notre vie. Un Père qui est certes miséricordieux, mais qui est miséricordieux dans la justice. Un Père qui ne peut être réduit à la caricature (Deus non irridetur) au nom d’une vision déformée et intéressée de l’idée de miséricorde.

Je n’ai pas l’intention d’aborder ici les questions liturgiques, même si je sais qu’elles nous tiennent à cœur. J’observe simplement que, précisément sur la base de Deus non irridetur et de la sainte crainte de Dieu, toute notre vie doit être liturgique, dans le sens où elle doit rendre gloire à Dieu.

Nous sommes parfois amenés à penser en termes purement quantitatifs, et nous nous considérons alors comme une petite minorité insignifiante. Mais l’homme de foi ne raisonne pas de cette manière. Cette bataille ne se joue pas sur le terrain des chiffres, mais au niveau de la prise de conscience de ce qui est en jeu.

Face au mondialisme, à l’économie verte, à l’écoterrorisme, à l’idéologie de l’accueil sans discernement, à la promotion du genre, à l’homosexualisme, la question que nous devons poser est toujours la même : cui prodest ? A qui cela profite-t-il ? Qui en profite ? Il en va de même pour l’église bergoglienne. Nous voyons ainsi que le gagnant, c’est le seigneur du mensonge, le menteur, le diviseur. Celui qui vous séduit avec l’idée d’un profit immédiat tout en dissimulant la destruction.

Nous devons savoir qu’en fin de compte, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Si, par exemple, nous relisons la bulle Ecclesiam a Jesu de Pie VII (année 1821) et remplaçons le mot Carbonari par le mot Davos, ou par l’acronyme Wef du Forum économique mondial, ou par les noms de Schwab &Cie, nous voyons que le discours de ce pontife peut être appliqué à la lettre à notre réalité. Mais si l’Église a autrefois dénoncé la conspiration, aujourd’hui, avec ses dirigeants déviants, elle s’y associe.

Malgré tout, le sensus fidei est à l’œuvre dans le peuple de Dieu. Par le biais de mon blog Duc in altum, je reçois de nombreuses sollicitations et je suis toujours frappé par le caractère concret des réflexions et des propositions, ce caractère concret typiquement chrétien qui va au cœur des problèmes.

Ainsi la bataille, qui semblerait être « de niche » et qui pourtant est décisive, pour la réception de la Sainte Eucharistie sur la langue et à genoux. Une bataille qui a été menée par de nombreux fidèles, souvent à l’insu les uns des autres, et qui est d’une importance fondamentale car nous sommes ici au cœur de notre foi. Le témoignage de ces fidèles, qui se fait souvent au prix de la souffrance et d’une véritable marginalisation, n’est pas seulement de forme, il est de fond ! C‘est pourquoi j’essaie, à ma façon, de donner une voix à ces personnes persécutées, en racontant les abus dont elles sont victimes, mais aussi la ténacité indomptable qui les caractérise et les résultats qu’elles parviennent souvent à obtenir en brisant le mur de l’hostilité ou de l’indifférence. L’action de ces fidèles fait partie du plan de restauration du Christ-Roi, un plan qui doit commencer par l’Église, dans laquelle Il doit être adoré et vénéré avec la plus grande dévotion.

Un autre rappel que je reçois est d’unir nos forces. Beaucoup constatent que face à l’augmentation du nombre de personnes qui ont ouvert les yeux, il y a encore beaucoup de fragmentation et il est difficile d’identifier des points de référence. Je réponds qu’en fait, beaucoup de choses ont été faites, mais que les gens en redemandent. Et je dois dire que la figure de Mgr Viganò est sans doute celle qui est la plus à même de jouer le rôle de catalyseur. Une reconnaissance d’autant plus significative qu’elle n’est pas le résultat d’un marketing religieux, tel que nous le voyons appliqué dans l’église bergoglienne, mais est entièrement spontanée.

En parlant de points de référence, il est clair qu’il en manque un [de nature] politique, comme nous l’avons vu lors des élections de septembre 2022. A cet égard, la demande qui me vient est double : aller sur le terrain et agréger les initiatives. Mais je crois personnellement qu’il ne faut pas prendre les devants. La dimension politique est importante, mais si les fruits ne sont pas encore mûrs, il faut le reconnaître et ne pas forcer la main. L’action culturelle, au sens le plus large du terme, est préliminaire à l’action politique. C’est au niveau culturel et social que naîtront les ressources et les énergies qui pourront également conduire à un engagement politique. Nous ne pouvons pas nous faire les interprètes d’une politique distillée dans un laboratoire.

En ce qui concerne l’après-Covid, et pour en venir à l’actualité de notre époque, je voudrais dire (et là aussi les indications que je reçois des lecteurs sont claires) que nous ne devons pas nous contenter d’une pacification au rabais.

Nous ne devons pas permettre qu’on cherche à tourner la page sans analyser ce qui s’est passé. Nous devons donc nous souvenir. Je sais, le désir d’aller de l’avant et de tout laisser derrière soi est fort et compréhensible, mais nous devons nous souvenir. Nous le devons à nous-mêmes, à notre dignité, mais aussi aux générations futures. Je prépare quelque chose à ce sujet et je pense que le titre que je donnerai à mon livre sera “Non è andato tutto bene” [ndt: l’un des slogans de la machine médiatique lors de la pandémie,était, en Italie, « Andrà tutto benne », càd « Tout ira bien »]. Nous avons été traités comme des cobayes, incités à prendre part à une expérimentation de masse qui a piétiné tous les droits à tous les niveaux. Les seigneurs du transhumanisme et de la vision néo-malthusienne, avec l’appui de l’église bergoglienne, nous ont entraînés dans une grande arnaque, un film d’horreur que beaucoup d’entre nous ont dénoncé très tôt mais que nous devons continuer à dénoncer, même si cela nous vaut l’étiquette de conspirationnistes. La conspiration était bien là, elle est bien là, et elle cherche maintenant de nouvelles formes pour mener à bien son projet habituel. Crier au complot n’est pas un signe de folie : c’est du réalisme.

Alors, disons non à la pacification à bon marché, non à l’habituel scurdammoce o’ passato [proverbe napolitain, en gros « tournons la page »]. C’est bien plus que ça! Nous devons nous souvenir. La Commission d’enquête doit être permanente dans nos cœurs et nos esprits.

Une pacification obtenue au prix de la dissimulation du cui prodest auquel j’ai fait référence précédemment, une pacification obtenue en faisant table rase des affaires et des relations sales entre les élites transnationales, le monde de la pseudo-science, les appareils technologiques et industriels, les médias et la politique, n’en serait pas une: ce serait une trahison envers nous-mêmes et envers tous ceux qui, en tant que membres de la Congrégation des Apoti, ont payé un prix. Ce serait une collaboration avec l’ennemi.

Les renégats et les bouffons sont déjà à l’œuvre pour lever l’écran de fumée, mais nous ne devons pas le permettre. Le chrétien est un homme de paix, mais il n’est pas un pacifiste. Nous ne pouvons accepter aucune réconciliation entre les opposés.

La guerre n’est pas terminée, en fait elle ne fait que commencer. Vous verrez que de nouveaux moyens seront bientôt trouvés pour nous effrayer, pour nous enfermer, pour faire de nous, une fois de plus, une masse intimidée, un troupeau docile que l’on mène où les maîtres de la pensée unique le veulent. De nouveaux moyens seront trouvés pour nous accuser de psycho-réaction. Nous devrons alors être encore plus vigilants, encore plus combatifs, encore plus prêts à nous battre. Il doit être clair qu’il ne peut y avoir d’apaisement, et pour nous il n’y en aura jamais, avec ceux qui ont conçu et mené l’expérience sociale qui est passée sous le nom de pandémie. Si nécessaire, nous prendrons le maquis Mais nous continuerons à proclamer : « Pas en mon nom » et « Tous, peut-être, mais pas nous ».

J’ai dit dans un autre discours que, inspirés par les dissidents de l’époque de l’empire soviétique, notre tâche est de construire la polis parallèle à tous les niveaux : un travail à faire surtout dans le domaine culturel et particulièrement dans l’éducation et la formation. Une polis dans laquelle la dimension morale de l’homme est récupérée, parce que le but des idéologues et des révolutionnaires de tous les temps et de toutes les couleurs est toujours de démoraliser l’homme au sens propre, c’est-à-dire de le dépouiller de la dimension morale, de la capacité de penser en termes de bien et de mal objectifs.

Rappelez-vous : « Le sujet idéal du régime totalitaire n’est pas le nazi convaincu ou le communiste convaincu, mais l’individu pour qui la distinction entre réalité et fiction, entre vrai et faux, n’existe plus ». Ce sont les mots de Hannah Arendt, dans son ouvrage Les origines du totalitarisme.

Face au grand Léviathan mondialiste, prenons la voie de la désobéissance civile. Un chemin que beaucoup d’entre nous ont découvert, ou redécouvert, précisément pendant la psychopandémie. Pratiquons, comme Thoreau (Henry David Thoreau, 1817-1862] l’appelle de ses vœux dans son célèbre essai [La désobéissance civile, 1849], la vertu du courage face à l’État qui exige notre collaboration avec le mal et l’appelle « sens des responsabilités ». Ne nous laissons pas hypnotiser. Rappelons-nous que nous devons obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Donner à César ce qui appartient à César ne signifie pas lui donner tout. Cela signifie lui donner ce qui est juste si César reste à sa place. Si César va à l’encontre de Dieu, notre tâche est de le défier pour qu’il produise des lois conformes au plan divin.

Les mots de Gandalf dans Le Seigneur des Anneaux de Tolkien doivent devenir les nôtres :

« D’autres maux peuvent venir, car Sauron lui-même n’est qu’un serviteur ou un émissaire. Mais il ne nous appartient pas de dominer toutes les marées du monde ; notre tâche est de faire ce que nous pouvons pour le salut des années dans lesquelles nous vivons, en éradiquant le mal des champs que nous connaissons, afin de laisser à ceux qui viendront ensuite une terre saine et propre à cultiver. Mais le temps qu’ils auront ne dépend pas de nous ».

C’est cela, le réalisme chrétien, opposé aux dystopies de toutes les idéologies qui, en voulant mettre l’homme à la place de Dieu, ne produisent que souffrance et mort. Faisons également nôtres les mots prononcés par la princesse Éowyn, toujours dans Le Seigneur des Anneaux :

« Je ne crains ni la mort ni la douleur, je crains la cage, être derrière les barreaux jusqu’à ce que l’habitude et la vieillesse les acceptent ».

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