L’archevêque Paglia « ouvre au suicide assisté ». La nouvelle, bien relayée par un journal de gauche libérale a fait l’effet d’une bombe dans les milieux catholiques (et comme je l’ai déjà dit, seulement dans ces milieux, le reste du monde se moque de ce qui vient de Rome). Cas typique de fenêtre d’Overton, et de tactique bergoglienne (on ne fera croire à personne que Paglia agit de son propre chef) qui consister à lâcher un ballon d’essai sur un thème clivant, quitte à rétro-pédaler après si la réaction est trop négative.

(*) En langage familier: bouffonnerie, farce. C’est aussi un jeu de mot sur le nom de Vincenzo Paglia.

Voir aussi

L’ultime pagliacciata, en faveur de l’euthanasie

LE PRÉSIDENT DE L’ACADÉMIE PONTIFICALE POUR LA VIE LANCE UN BALLON D’ESSAI POUR L’EUTHANASIE ACTIVE

Giuseppe Nardi
katholisches.info
25 avril 2023

En étroite collaboration avec Sainte Marthe, Paglia fait voler des ballons d’essai.

(Rome) Le président de l’Académie pontificale pour la vie, Mgr Vincenzo Paglia, est depuis longtemps considéré comme inacceptable par les opposants. Il vient d’émettre une nouvelle « pagliacciata », un mot qui signifie « farce », mais qui est en même temps un jeu de mots avec le nom de famille de l’archevêque curial. Mgr Paglia a livré sa « farce » et l’Académie pontificale pour la vie a fait marche arrière hier. La procédure est connue. C’est ainsi que l’on lance des ballons d’essai. L’objectif est ainsi fixé et pointe vers l’euthanasie.

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Le 19 avril, Paglia, en sa qualité de président de l’Académie pontificale pour la vie, a prononcé un discours au Festival du journalisme de Pérouse sur le thème: « Le dernier voyage (vers la fin de vie) ». Le discours n’était pas seul, mais « accompagnait » un documentaire qui a été présenté. Celui-ci décrit avec bienveillance l’histoire d’un Italien qui s’est rendu en Suisse pour y être euthanasié. Les organisateurs du festival avaient un agenda bien défini.

Première page d’Il Riformista le 21 avril.

Vu le nombre de journalistes présents, l’événement a été largement couvert. Le 21 avril, le quotidien italien de centre-gauche Il Riformista a publié l’intégralité de l’intervention de l’archevêque en première page, avec photo et annonce : « Débat sur la fin de vie : Mgr Paglia est ouvert à la loi sur l’aide au suicide ».
Ce qu’on appelle en italien, de manière lénifiante « aide au suicide » se dit en allemand « euthanasie ».

Le quotidien a laissé toute la page trois à l’archevêque, bien en évidence. Le titre principal était ainsi rédigé : « Aide au suicide : le temps est venu d’adopter la loi ».

Regardons le sous-titre :

« Le débat sur la fin de vie et les positions de l’Eglise en mouvement. L’Eglise n’est pas un distributeur de pilules de vérité. Ses principes, voir la peine de mort, évoluent ».

Personne ne devrait s’étonner de la prise de position de Mgr Paglia. De telles « pagliacciate » ont déjà eu lieu par le passé.
Le problème a commencé en 2000, quand Jean-Paul II a cédé au lobbying de la communauté de Sant’Egidio et a cru devoir récompenser sa proximité affichée avec le Saint-Siège en accordant la dignité épiscopale à son assistant spirituel, précisément Paglia.

Paglia est alors devenu l’évêque du diocèse de Terni-Narni-Amelia.

C’est à un tout autre lobbying que l’on doit le choix encore moins compréhensible de Paglia, que Benoît XVI a nommé en 2012 président du Conseil pontifical de la famille et fait venir à la Curie romaine. Cette nomination s’est accompagnée d’une élévation au rang d’archevêque [c’est malheureusement exact, ndt].

L’archevêque Paglia avait mis à Terni un joli chaos dans les finances diocésaines, avec notamment un Jugement dernier homo-érotique réalisé par un artiste homo argentin dans l’église épiscopale. Les irrégularités financières ont même attiré l’attention du ministère public. Sa nomination au Vatican ressemblait à une opération de sauvetage que l’on a mise sur le dos de Benoît XVI.

En pleine page:
un sujet qui plaît à la gauche

Mais ce n’est que depuis l’élection du pape François que le prélat de Curie semble se sentir vraiment à l’aise. Il n’y a désormais « plus de retour en arrière », a-t-il fait savoir publiquement. A la veille du premier synode sur la famille en 2014, il a implicitement déclaré que la doctrine morale et matrimoniale transmise par l’Eglise était une forme de cruauté.

Quand François a remanié la Curie romaine et dissous le Conseil de la famille, Paglia s’est vu confier une nouvelle mission en 2016 : démanteler deux bastions érigés par Jean-Paul II [cf. Institut JP II].

Paglia est devenu président de l’Académie pontificale pour la vie (que le pape polonais avait créée comme rempart pour défendre la sainteté de la vie de la conception à la mort naturelle, en particulier le droit à la vie des enfants à naître), et grand chancelier de l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille, qui était un rempart pour défendre la sainteté du mariage et de la famille.

Dans les deux institutions, aucune pierre n’est restée sur l’autre grâce à Paglia, comme François le lui avait demandé. Tous les membres de l’Académie pontificale, bien que nommés à vie, ont été mis à la porte pour que les postes soient ensuite repourvus. L’Institut du mariage et de la famille a été fermé. Tous les collaborateurs et chargés de cours qui défendaient une doctrine du mariage et de la morale « trop stricte » et qui s’opposaient au nouveau cours d’Amoris laetitia ont été licenciés. Un nouvel institut, avec de nouveaux statuts et un nouveau personnel, a été fondé sous un nouveau nom, même si sa consonance est similaire.

Des prises de parole tordues et coordonnées sont depuis lors à l’ordre du jour, de même que d’étranges personnages vont et viennent désormais au Vatican. Des partisans de l’euthanasie et de l’avortement ont été invités au Vatican en tant qu’orateurs lors de réunions et de manifestations des académies pontificales. Récemment, l’économiste gourou de la gauche Mariana Mazzucato, qui se définit comme athée et se prononce en faveur de l’avortement, a même été nommée membre de l’Académie pour la vie. Depuis que Paglia est président de l’Académie, le droit à la vie et les défenseurs de la vie reçoivent en permanence des claques. Franciscus lo vult. Il n’est donc pas surprenant que l’architecte de ces transformations ait fait les dernières déclarations scandaleuses.

Quand des critiques se sont élevées après le discours de Paglia et sa reproduction dans Il Riformista, l’Académie pontificale pour la vie – donc en fait Paglia lui-même – a publié hier, le 24 avril, un communiqué de presse par lequel elle aurait « clarifié » la position de son président. Le jeu est connu: On lance un ballon d’essai pour tester les réactions, puis on fait un peu marche arrière pour calmer le jeu. Mais la direction à prendre est clairement indiquée : une ouverture sur l’euthanasie.

Dans sa prise de position, l’Académie pontificale pour la vie « explique », sans surprise, que Mgr Paglia a été « mal compris », ce qui a conduit à des « interprétations erronées de sa pensée ».

Le message essentiel de la mise au point est le suivant :

« Mgr Vincenzo Paglia, président de l’Académie pontificale pour la vie, réaffirme son ‘non’ à l’euthanasie et au suicide assisté en plein accord avec le magistère ».

Mais est-ce bien le cas ? Oui, si l’on fait l’autruche et qu’on se laisse bercer par des circonlocutions. A Pérouse, lit-on dans le communiqué, Paglia a « seulement » indiqué, qu’

« il ne faut pas exclure la possibilité d’une médiation juridique dans notre société, qui permette le suicide assisté dans les conditions fixées par l’arrêt 242/2019 de la Cour constitutionnelle : La personne doit être ‘maintenue en vie par un traitement de survie et affectée d’une pathologie irréversible, source d’une souffrance physique ou psychique qu’elle juge insupportable, mais être pleinement capable de faire des choix libres et conscients' ».

Il suffit de jeter un coup d’œil sur les justifications de la légalisation de l’euthanasie aux Pays-Bas et en Belgique pour se rendre compte que l’on y a argumenté de la même manière pour ouvrir une première brèche dans le barrage. Entre-temps, après de nouvelles étapes d’ « ouverture », les Pays-Bas en sont arrivés à un point tel que la vie d’une personne ne sera bientôt plus protégée sans restriction par la loi.

Paglia a déclaré textuellement :

« Personnellement, je ne pratiquerais pas l’aide au suicide, mais je comprends que la médiation juridique peut représenter le plus grand bien commun concrètement possible dans les conditions dans lesquelles nous nous trouvons ».

On connaît des choses similaires dans le débat sur l’avortement, où de nombreuses « bonnes âmes » déclarent ne pas vouloir elles-mêmes « faire avorter », mais que la décision doit être laissée à chacun.

Le meurtre comme option.

C’est exactement ce qui ressort des déclarations de Paglia à Pérouse et du communiqué de presse de l’Académie pontificale. Pas moi, mais…

Et comme l’immense majorité des gens savent bien sûr « instinctivement » que tuer en tant qu’option est une erreur, la légalisation par une loi aux nombreux termes obscurcissants doit créer une légitimité factice.

Au Vatican, tout le monde ne semble plus savoir ce que le catéchisme de l’Église catholique enseigne sur l’euthanasie :

« L’euthanasie volontaire, sous quelque forme et pour quelque motif que ce soit, est un homicide. Elle est une grave atteinte à la dignité de l’homme et au respect dû au Dieu vivant, son Créateur » (CEC, 2324).

Et sur le suicide :

« Le suicide est une grave violation de la justice, de l’espérance et de la charité. Il est interdit par le cinquième commandement » (CEC, 2325).

Dans l’encyclique Evangelium vitae de 1995, le pape Jean-Paul II écrit :

« Je confirme, en accord avec le magistère de mes prédécesseurs et en communion avec les évêques de l’Église catholique, que l’euthanasie est une grave violation de la loi divine, dans la mesure où il s’agit d’un homicide volontaire d’une personne humaine, ce qui est moralement inacceptable. Cette doctrine est fondée sur le droit naturel et sur la Parole écrite de Dieu, transmise par la Tradition de l’Église et enseignée par le Magistère ordinaire et universel de l’Église » (EV, 65).

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