L’interview de Peter Seewald que j’ai reprise hier de Belgicatho (cf. Peter Seewald déballe tout) contient de nombreux points sur lesquels il faudrait s’arrêter. Parmi ceux-ci, un passage assez extraordinaire concerne le concept fascinant de « Katechon », issu de la 2ème Lettre de saint Paul aux Thessaloniciens, et que nous avons souvent évoqué dans ces pages, justement à propos de Benoît XVI.
Il semble qu’à une question pressante du journaliste allemand, lui demandant pourquoi « il ne pouvait pas mourir » (j’ai utilisé le traducteur automatique, en allemand, on lit Er müsse noch dableiben, antwortete er auf meine Frage, warum er nicht sterben könne), le Saint-Père ait répondu qu’il devait rester « comme un mémorial pour le message authentique de Jésus, comme une lumière sur la montagne » (Als ein Mahnmal für die authentische Botschaft Jesu, als ein Licht auf dem Berg ), avant de conclure « A la fin, le Christ vaincra »

Les dernières nouvelles en provenance du Vatican m’ont rappelé un essai devenu célèbre de Georgio Agamben. Dans son texte sur le « mystère du mal », le philosophe le plus polémique de notre époque met en cause Benoît XVI. En tant que jeune théologien, Ratzinger aurait un jour fait la distinction, dans une interprétation de Saint Augustin, entre une Eglise des infâmes et une Eglise des justes. Depuis le début, l’Église est inextricablement mélangée. Elle est à la fois l’Eglise du Christ et l’Eglise de l’Antéchrist. Il y a cependant, selon Agamben, l’idée du katechon…

.

En se référant à la deuxième lettre de l’apôtre Paul aux Thessaloniciens, il faut entendre par là le principe de l’arrêt. Un terme qui est également interprété comme un « obstacle », pour quelque chose ou pour quelqu’un qui retarde la fin des temps. Selon Agamben, Benoît XVI était en quelque sorte un « retardateur ». Dans ce contexte, sa démission aurait inévitablement provoqué une séparation de la « belle » Eglise et de la « noire » Eglise, cette marge dans laquelle le bon grain se sépare de l’ivraie. C’est une thèse très dure. Mais le pape émérite était apparemment du même avis. Il doit encore rester, a-t-il répondu à ma question de savoir pourquoi il ne pouvait pas mourir. Comme un mémorial pour le message authentique de Jésus, comme une lumière sur la montagne. « A la fin, le Christ vaincra », a-t-il ajouté.

*

https://www.kath.net/news/82121

Bref, tout cela a un côté dramatique qui met à mal l’image aussi stupide que fausse du paisible retraité attendant que le temps passe jusqu’à sa mort entre quelques visites d’amis, ses chats, son piano et des promenades dans les jardins du Vatican, bref le fameux « grand père sage à la maison » (un grand-père qui n’avait que 10 ans de plus que son présumé petit-fils, je sais que dans les familles d’aujourd’hui – dont Tucho va prendre soin -, on en voit de toutes les couleurs, mais quand même…) inventé par François et ses leccapiedi.

Share This