Contrairement à ce que je disais hier, même après la mort de Benoît XVI, Andrea Cionci n’a pas abandonné sa théorie sur la renonciation forcée et la sede impedita, mais au contraire continue à la défendre avec une ardeur renouvelée qui force l’attention. Ici, il reprend un commentaire averti d’un lecteur qui dissèque la declaratio du 11 février 2013 pour en extraire tout ce qui, sans même avoir recours à des théories complotistes ou des conjectures (présumées) tirées par les cheveux, laisse percevoir les véritables intentions du Saint-Père.

Ratzinger a toujours été le Katechon, Bergoglio est un usurpateur

par Andrea Cionci
www.romait.it
8 juillet 2023

La mission de Benoît XVI s’est accomplie : ce n’est qu’au moment de sa mort qu’il a rendu le munus que Dieu lui avait remis.

Nous avons reçu d’un lecteur une lettre qui mérite d’être publiée.

La situation est très grave : les ennemis bergogliens ne suffisent pas, il faut aussi se méfier de la subversion traditionaliste. En effet, des franges semi-sédévacantistes mènent une opération organisée pour discréditer Ratzinger, en essayant de le faire passer pour un « moderniste » afin de fustiger tous les papes post-conciliaires et de s’auto-proposer comme les authentiques héritiers de la foi catholique.

Il s’agit d’une opération illégale, en dehors de la légitime succession pétrinienne et qui ne vise nullement à protéger le Siège apostolique usurpé, comme le prévoit Universi Dominici Gregis. Cette tendance est avant tout schismatique puisqu’elle assurerait soit un conclave de compromis [inciucio – patois napolitain, ndt] avec les 81 faux cardinaux de nomination antipapale, soit une refondation schismatique de l’Église catholique.

Mais Ratzinger était bien plus que ce que ces nouveaux ennemis inattendus de la papauté voudraient nous faire croire.

Andrea Cionci

Joseph Ratzinger a été un kathéchon bien avant de devenir pape

Appelé en 1981 comme préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, il avait été la cheville ouvrière de Jean-Paul II pour l’institution vaticane la plus importante dans la garde de l’orthodoxie catholique. Une cheville ouvrière qui a permis au pape Wojtyla de « dormir sur ses deux oreilles » et de consacrer son charisme sans limite et sa foi inébranlable à la proclamation de l’Évangile aux peuples de tous les coins de la planète.

Nous ne savons pas si et combien de fois le préfet allemand a dissuadé Jean-Paul II d’entreprendre certaines initiatives, mais il est certain qu’il a représenté le contrepoids doctrinal à l’élan prophétique du pape polonais. Preuve en est son opposition à la rencontre multireligieuse d’Assise en 1986, dans laquelle Ratzinger a manifestement vu une faille par où des successeurs malheureux auraient pu facilement insérer le pied de biche de l’indifférentisme religieux.

Ce qui est certain, c’est que toute la sagesse, la clairvoyance et la solidité « katéchonique » du Panzerkardinal ont trouvé leur substance dans des écrits tels que Dominus Jesus en 2000 et, plus tôt encore, dans le Catéchisme de l’Église catholique, véritables boucliers dressés contre une menace syncrétiste et maçonnique de plus en plus imminente.

Il est bien connu, et cela a été expliqué de manière irréfutable par Mgr Gänswein, que dans l’Église du deuxième millénaire, le parti du Sel de la Terre et la brigade mafieuse de Saint-Gall se faisaient face, cette dernière étant l’expression – non pas symbolique, mais incarnée dans une foule de prélats infidèles à la Doctrine de toujours – de la volonté de faire dévier le cours de la barque de Saint-Pierre vers des rivages maçonniques et certainement aussi gnostico-lucifériens.

Le cardinal Ratzinger était parfaitement conscient de cette lutte entre la lumière et les ténèbres, à la fois en raison d’une sensibilité qui lui est venue de décennies d’études et de spéculation théologique, et en raison du point d’observation privilégié que lui offrait son rôle de préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Il savait parfaitement que l’avancée maçonnique et ultra-progressiste – certainement favorisée par une déclinaison déformée des déclarations du Concile – avait atteint le trône pétrinien.

Et en effet, dans son homélie du 18 avril 2005 lors de la messe pro eligendo romano pontifice, le doyen des cardinaux, Joseph Ratzinger, n’avait pas hésité à dénoncer le fait que « une dictature du relativisme était en train de s’instaurer, qui ne reconnaît rien comme définitif et qui ne laisse comme mesure ultime que son propre ego et ses désirs ».

Cette déclaration lucide et terrible ne peut s’expliquer que par l’intention d’alerter ceux qui avaient des oreilles pour entendre qu’il fallait faire très attention à ce qui allait se décider quelques heures plus tard, car l’infiltration maçonnique dans le groupe des conclavistes était certaine.

En d’autres termes, Ratzinger appelait ses associés du Sel de la Terre à œuvrer pour endiguer la menace relativiste. Cet appel aux armes a eu pour effet d’élire Ratzinger lui-même, le meilleur défenseur possible de l’orthodoxie catholique.

Cependant, même si cela ne sera jamais établi avec certitude, le Conclave de 2005 avait en même temps montré à quel point les forces obscures étaient devenues puissantes, puisque J.M. Bergoglio était sorti de cette assemblée en deuxième position derrière Ratzinger en termes de votes obtenus.

Tout porte à croire qu’il s’agissait d’une nomination différée. Tout comme l’Évangile raconte que le diable – vaincu par le Christ dans l’épisode de la triple tentation – est parti pour revenir au moment opportun.

La declaratio [cf. Annexe]

Il n’y a pas grand-chose à ajouter à ce qui a été écrit et dit sur le texte lu par Benoît XVI le 11 février 2013 et sur la portée réelle de cette déclaration.

Nous souhaitons ici souligner – en ayant conscience d’être redondants – que même le pape émérite n’aurait pas eu besoin d’un message supplémentaire, plus ou moins sibyllin, pour expliquer le sens de son action.

En effet :

  • la prémisse de la declaratio est une prise de conscience de la difficulté d’exercer le munus petrino, c’est-à-dire de conduire la barque de Pierre et d’annoncer l’Évangile ;
  • Benoît, en raison de l’empêchement dans lequel les cardinaux le placent involontairement, renonce à ces deux explicitations spécifiques de la papauté en retirant de son habit la mozzetta et l’étole qui en sont précisément les symboles extérieurs ;
  • Benoît ne retire pas la soutane blanche, ni le nom pontifical, ni aucun autre élément relatif au fait d’être Pape ;
  • Benoît reste donc Pape, entravé, mais Pape.

Il ne renonce pas à la direction de l’Église, mais il promet :

  • « Moi, retiré avec ma prière, je serai toujours avec vous, et ensemble nous allons de l’avant avec le Seigneur, dans la certitude : le Seigneur gagne ! » (au clergé romain le 14 février 2013) ;
  • « Cette gratitude demeure en moi, et même si maintenant la communion « extérieure », « visible » se termine – comme l’a dit le cardinal Ravasi – la proximité spirituelle demeure, une profonde communion dans la prière demeure. C’est dans cette certitude que nous avançons, sûrs de la victoire de Dieu, sûrs de la vérité de la beauté et de l’amour. (à la Curie romaine le 23 février 2013) ;
  • « Je voudrais encore, avec mon cœur, avec mon amour, avec ma prière, avec ma réflexion, avec toutes mes forces intérieures, travailler pour le bien commun et le bien de l’Église et de l’humanité. … Allons de l’avant avec le Seigneur pour le bien de l’Église et du monde ». (de Castel Gandolfo, le 28 février 2013).

Mission accomplie

La mission de Benoît XVI a été accomplie : au moment de sa mort, il a rendu à Dieu – comme saint Pierre a rendu les clés au Christ lors du jugement de la Sixtine – le munus que Dieu lui avait donné. Ce munus, il l’avait gardé comme un tabernacle vivant pendant dix ans, le préservant de la horde maçonnique.

S’il avait abdiqué rituellement, la brigade de Saint-Gall aurait non seulement obtenu le pouvoir pratique, mais aurait conquis l’essence même de la papauté. Au lieu de cela, l’évêque vêtu de blanc qui ne faisait pas la génuflexion devant le Saint-Sacrement ne restait qu’une marionnette sans âme, un antipape, dont les actes devaient être annulés de bout en bout par la constitution apostolique Universi Dominici Gregis.


Annexe: La declaratio du 11 février 2013

Lien vers la version officielle sur le site du Vatican: www.vatican.va/content/benedict-xvi/la/speeches/2013/february/documents/hf_ben-xvi_spe_20130211_declaratio…

Prononcée en latin (il faut le dire, d’une voix très basse, difficilement audible, le Saint-Père était visiblement épuisé) elle a été traduite dans les différentes langues, avec des variantes par apport au texte latin, les langues vernaculaires, notamment le français, ne faisant pas en général la distinction (cruciale selon Cionci) entre munus (investiture divine) et ministerium (exercice pratique), tous deux traduits en français par « ministère »: ceci est la clé de voûte de la théorie de Cionci.

Lequel propose la « vraie » traduction – commentée – en italien par un latiniste distingué qu’il a sollicité: www.romait.it/la-vera-traduzione-della-declaratio-di-benedetto-xvi-che-scismo-bergoglio

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