Et selon son habitude il se sert des médias. Mis le dos au mur, face aux attaques contre Fiducia Supplicans, il vient d’accorder sa millième interview (je donne un chiffre au hasard, mais il n’est pas invraisemblable). Et il a choisi La Stampa, un titre qui lui est tout acquis, tout comme le journaliste qui l’interroge respectueusement (Domenico Agasso). J’ai essayé de lire l’article ce matin, et je me suis heurtée littéralement à un mur (un pay wall, précisément!). L’article est réservé aux abonnés. Jusqu’à ce midi, où le site m’informe qu’il m’est offert gracieusement (avec ce pape, la persévérance paierait donc?). En réalité, ce n’est pas très intéressant, toujours les mêmes sujets (les conflits au Moyen-Orient et en Ukraine) les mêmes lieux communs (la guerre, c’est mal, elle profite aux marchands d’armes, il faut le dialogue), des anecdotes plus ou moins authentiques sur son élection, des proclamations d’autosatisfaction et des analyses de bistrot sur des sujets auxquels il n’entend rien, par exemple l’intelligence artificielle, qui mérite évidemment un traitement approfondi..

Notons qu’à la question sur l’Eglise ouverte à tous (todos, todos, todos), François ne craint pas de relancer son exégèse personnelle et surtout fallacieuse de l’évangile de Matthieu sur le banquet de noces (cf. le commentaire de José Arturo Quarracino, Quand le pape falsifie l’évangile (et de deux!))

Question: Craignez-vous un schisme ?

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« Non. Il y a toujours eu dans l’Église des petits groupes qui manifestaient, des réflexions de couleur schismatique… il faut les laisser faire et passer… et regarder devant soi ».

Traduction: je m’en moque.
Sous-entendu: c’est ce que je recherche.

Extraits (l’interview est assez longue, j’ai coupé au sécateur, le reste est franchement sans intérêt)

(www.lastampa.it/vatican-insider)

L’été dernier à Lisbonne, devant des millions de jeunes, vous avez crié avec force que l’Église est pour « todos, todos todos » : rendre l’Église ouverte à tous est-il le grand défi de votre pontificat ?

« C’est la clé pour comprendre Jésus. Le Christ appelle tout le monde à entrer. Tout le monde. Il y a une parabole : celle du banquet de mariage auquel personne ne se présente, et donc le roi envoie des serviteurs  » aux carrefours et tous ceux que vous trouverez, appelez-les aux noces « . Le Fils de Dieu veut faire comprendre qu’il ne veut pas d’un groupe sélectionné, d’une élite. Alors quelqu’un peut peut-être « entrer clandestinement », mais à ce moment-là, c’est Dieu qui s’en occupe, qui montre le chemin. Lorsqu’on me demande : « Mais ces personnes qui sont dans une situation morale si inappropriée peuvent-elles aussi entrer ? », je les rassure : « Tout le monde, le Seigneur l’a dit ». Des questions de ce genre me viennent surtout ces derniers temps, après certaines de mes décisions…’.

Notamment la bénédiction des « couples irréguliers et de même sexe »….

« Ils me demandent comment c’est possible. Je réponds : l’Évangile est de sanctifier tout le monde. Bien sûr, à condition qu’il y ait de la bonne volonté. Et il faut donner des instructions précises sur la vie chrétienne (j’insiste sur le fait qu’on ne bénit pas l’union, mais les personnes). Mais nous sommes tous pécheurs : alors pourquoi établir une liste de pécheurs qui peuvent entrer dans l’Église et une liste de pécheurs qui ne peuvent pas être dans l’Église ? Ce n’est pas l’Évangile ».

Lors de l’entretien télévisé très populaire avec Fabio Fazio dans l’émission Che Tempo Che Fa, vous avez parlé du prix de la solitude à payer après une telle démarche : comment vivez-vous la levée de boucliers de ceux qui protestent ?

« Ceux qui protestent avec véhémence appartiennent à de petits groupes idéologiques. Les Africains sont un cas à part: pour eux, l’homosexualité est quelque chose de « laid » d’un point de vue culturel, ils ne la tolèrent pas [et pour les autres, ce n’est pas le cas???] . Mais d’une manière générale, j’ai confiance dans le fait que, petit à petit, tout le monde acceptera l’esprit de la déclaration « Fiducia supplicans » du Dicastère pour la Doctrine de la Foi : elle veut inclure, et non diviser. Elle invite les gens à accueillir, puis à se confier à Dieu ».

Souffrez-vous de la solitude ?

« La solitude est aussi variable que le printemps : à cette saison, tu peux avoir une belle journée, avec du soleil, un ciel bleu et une brise agréable ; 24 heures plus tard, peut-être que le temps t’assombrit. Nous faisons tous l’expérience de la solitude. Celui qui dit « je ne sais pas ce qu’est la solitude » est une personne à qui il manque quelque chose. Lorsque je me sens seul, je commence par prier. Et quand je sens des tensions autour de moi, j’essaie calmement d’instaurer le dialogue et la confrontation [ah bon? ça ne saute pas aux yeux]. Mais je vais de l’avant, toujours, jour après jour ».

Craignez-vous un schisme ?

« Non. Il y a toujours eu dans l’Église des petits groupes qui manifestaient, des réflexions de couleur schismatique… il faut les laisser faire et passer… et regarder devant soi ».

(…)

Comment va votre santé ?

« Quelques courbatures, mais ça va mieux maintenant, je vais bien ».

Cela vous gêne-t-il d’entendre parler de votre éventuelle démission à chaque toux ?

« Non, parce que la démission est une possibilité pour chaque pontife. Mais maintenant, je n’y pense plus. Cela ne me dérange pas. Si et quand je n’y arriverai plus, je commencerai éventuellement à y penser. Et à prier à ce sujet.

(…)

Quel est votre rêve pour l’Église à venir ?

« Suivre la belle définition de « Dei Verbum », la constitution dogmatique du Concile Vatican II : « Dei Verbum religiose audiens et fidenter proclamans », écouter religieusement la Parole de Dieu et la proclamer avec une ferme confiance, et avec force. Je rêve d’une Église qui sache être proche des gens dans le concret et les nuances de la vie quotidienne. Je continue à penser ce que j’ai dit dans les Congrégations Générales, les réunions des cardinaux qui précèdent le Conclave : « L’Église est appelée à sortir d’elle-même et à se diriger vers les périphéries, non seulement géographiques mais aussi existentielles : celles du mystère du péché, de la douleur, de l’injustice, celles de l’ignorance et de l’absence de foi, celles de la pensée, celles de toutes les formes de misère ».

Quel souvenir gardez-vous des journées historiques du mois de mars, il y a onze ans ?

« Après mon discours, il y a eu des applaudissements, du jamais vu dans ce contexte. Mais je n’avais absolument pas deviné ce que beaucoup allaient me révéler plus tard : ce discours était ma « condamnation ». En sortant de la « salle du synode », un cardinal anglophone m’a vu et s’est exclamé : « Bello, ce que tu as dit ! Bello. Bello. Nous avons besoin d’un pape comme toi! » Mais je n’avais pas remarqué la campagne qui se préparait pour m’élire [!!!]. Jusqu’au déjeuner du 13 mars, ici à la Casa Santa Marta, quelques heures avant le vote décisif. Pendant que nous mangions, on m’a posé deux ou trois questions « suspectes »… Alors, dans ma tête, j’ai commencé à me dire : « Il se passe quelque chose d’étrange ici… ». Mais j’ai quand même réussi à faire une sieste. Et quand j’ai été élu, j’ai eu un surprenant sentiment de paix en moi.

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